Postnatal: quand et comment reprendre l'entraînement ?
PAR: ÉLISE CORBEIL
ENTRAÎNEUR-KINÉSIOLOGUE
Photographe: Julie Bernard
Membre photographiée: Kim Morin, maman de Kamran et Kalyana
La période postnatale fait appel aux facultés d'adaptation. Le quotidien est chamboulé par l'arrivée de bébé. Il faut repenser sa routine quotidienne sans pour autant s'oublier. Physiquement et physiologiquement, on doit composer avec un corps qui a, pendant neuf mois, fait des exploits.
On attend souvent le «ok» du médecin, qui est normalement obtenu lors du suivi prévu à six semaines post-partum, alors qu’il est possible, sans contre-indication, de commencer un travail doux dès les premiers jours.
Cet article vous propose des recommandations pour reprendre l’entraînement postnatal. Objectifs: optimiser votre retour à l’activité physique en douceur et réduire le risque de symptômes persistants pour la suite.
REPRENDRE EN DOUCEUR
Tout d’abord, il est important de se rappeler que l’accouchement est un exploit physique d’une rare intensité. Comme on programme une phase de récupération dans la périodisation d’un athlète qui vient de compléter une compétition, les semaines qui suivent l’accouchement doivent être considérées de la même façon. Il y a bien sûr quelques éléments anatomiques à prendre en considération dans le processus.
Premièrement, les organes ont passé les neuf derniers mois à se déplacer pour faire de la place au bébé. Ils auront besoin de trois à quatre mois pour graduellement retrouver leur position. Les articulations, affectées par le cocktail hormonal de la grossesse, demanderont également quelques mois pour retrouver leur stabilité. Il est donc important de recommencer à bouger doucement et graduellement.
Il peut également y avoir certains inconforts au niveau pelvien ou articulaire qu’il voudra mieux prendre en charge rapidement avec une physiothérapeute ou une kinésiologue formée en entraînement périnatal. On peut penser à une sensation de lourdeur au niveau du périnée, ce qui pourrait être un signe de prolapse, ou une sensation de décharge électrique au niveau de la symphyse pubienne. Il est d’ailleurs recommandé d’aller consulter une physiothérapeute périnéale entre douze et seize semaines post-partum, même en cas de césarienne, et même en l’absence de symptômes dérangeants.
QUAND ET COMMENT
Voici trois phases qui permettront de structurer votre retour à l’entraînement. Les recommandations qui suivent s’appuient sur les Directives canadiennes en matière d’activité physique. Il est toujours de mise de consulter votre médecin pour recommencer à bouger après l’accouchement.
Phase 1 (0 à 3 semaines après l’accouchement)
Il est important de passer le plus de temps possible en position horizontale pendant les trois à sept premiers jours pour limiter les effets de la gravité sur les organes. Il est toutefois possible de faire des exercices circulatoires au niveau des poignets et des chevilles, et de pratiquer la respiration abdominale pour connecter le souffle à l’engagement du plancher pelvien et des abdominaux profonds. Ces exercices aident à retrouver les sensations des muscles profonds, ce qui facilitera la rééducation le moment venu.
À partir de la deuxième semaine, en fonction de l’énergie de la maman, il est possible d’aller marcher lentement pour une durée de cinq minutes. Au fil des semaines, il sera possible d’augmenter la durée des sorties à coup de cinq minutes supplémentaires, jusqu’à trente minutes, à condition de ne pas ressentir des symptômes pendant ou dans les deux heures suivant la sortie. Il pourrait aussi être intéressant de faire quelques exercices de mobilité au niveau du cou, des épaules et des hanches pour gagner en confort.
Phase 2 (3 semaines à 3 mois)
Cette période est tout indiquée pour le renforcement des fessiers et des muscles posturaux. Le travail périnéal pourra se poursuivre. Si l'énergie est disponible, il sera ainsi possible d’intégrer des exercices de renforcement du plancher pelvien qui devront cependant être adaptés à la condition de la maman. On peut penser à des contractions à plusieurs niveaux d’intensité, comme des contractions maximales ou du travail d’endurance.
On pourra aussi augmenter la complexité de la connexion « respiration/abdominaux profonds » en intégrant l’activation des obliques internes et externes. Au fil des semaines, il sera possible d’ajouter des exercices ciblant les jambes, les muscles fessiers et la chaîne postérieure, ainsi que quelques étirements doux.
Pour cette phase, il est recommandé d’éviter les flexions du tronc, les torsions profondes ou les flexions latérales. On devra donc attendre quelques semaines de plus avant de faire des planches ou des pompes. Essayez aussi de limiter la rétention de souffle à l’effort et commencez à intégrer des exercices cardiovasculaires sans impact, comme de la marche avec un léger dénivelé ou du vélo.
Phase 3 (3 mois et plus)
Après trois mois, il sera possible d’ajouter graduellement des charges aux mouvements faits précédemment et d'augmenter le niveau de difficulté des exercices. Également au programme, une focalisation sur la rééducation de la diastase du grand droit (séparation de la partie superficielle de l’abdomen) et la complexification du gainage avec des mouvements abdominaux anti-extension en utilisant le poids du corps.
À travers toutes les étapes mentionnées ci-dessus, il faut se rappeler d’être patiente et à l’écoute de son corps, quitte à sauter une sortie à la marche si notre corps nous communique de ralentir. On doit aussi faire preuve de flexibilité, se permettre de séparer son entraînement en deux blocs, de les distribuer à deux moments dans la journée. Mieux vaut prendre son temps et faire le reconditionnement du corps lentement que de brûler des étapes, ce qui pourrait retarder le retour à l’activité physique sans restriction.
ET LE YOGA ?
Un petit mot sur le yoga: passion personnelle. À moins de suivre des cours de yoga postnatal, il est recommandé d’attendre quatre semaines avant de reprendre les cours. Dans tous les cas, assurez-vous d’y aller doucement et d’ajuster votre pratique. Par exemple, vous pouvez utiliser les blocs pour un support accru, contrôler la profondeur des extensions de la colonne, en se concentrant sur l’ouverture de la poitrine et contenir les torsions profondes du tronc. Il sera aussi bénéfique de modifier les poses spécifiques aux grands droits de l’abdomen, comme la planche, chaturanga, navasana - le bateau, ou les redressements assis. Finalement, si les inversions faisaient partie de votre pratique avant la grossesse, comme l’équilibre sur les mains, sur les avant-bras, sur la tête ou sur les épaules, patientez jusqu’à trois mois avant de les réintégrer.
À RETENIR
Il est possible dès les premiers jours à mettre la table en douceur pour la reprise de l’entraînement. Il sera particulièrement important d’être à l’écoute de son corps lorsque l’on recommence à bouger. Il ne faut pas se précipiter, la patience est de mise. Si l’énergie manque, écourter son effort est tout à fait excusable, mais comme pour tous types d’entraînement construire une régularité est important.
Vous pouvez naturellement compter sur l’équipe du Studio pour vous guider dans une remise en forme adaptée. Il sera possible d'évaluer les déséquilibres musculaires ou de déterminer si vous êtes prêtes à un retour vers des exercices avec des impacts, comme la course à pied. Le meilleur moment pour reprendre les séances ATH, ATH/SE ou boxe pourra également être identifié.
Pour terminer, il est impossible de passer à côté de l’apport de l’entraînement pour les mamans que j’ai la chance d’épauler au Studio. Être en mesure de mettre un moment de côté pour soi dans le tourbillon des premiers mois leur permet de relever ce beau défi. Je suis privilégiée de vivre ça avec elle !
PRENEZ CONTACT
Vous êtes intéressé(e), mais vous avez des questions, écrivez-nous. Nous pourrons vous orienter vers les services adaptés à vos besoins. Si vous le désirez, nous pourrons planifier une visite du Studio.
Pour bien servir nos membres, nous plafonnerons prochainement le nombre d’adhérents.
Remplissez le formulaire et nous communiquons avec vous dans les plus brefs délais.
QUELQUES MOTS SUR ÉLISE
Après avoir touché à tous les sports imaginables, elle adopte la danse et la course. Après six ans de danse, tous styles confondus et plusieurs courses de fond (10, 21 km), elle accroche ses souliers de danse, de course, pour se consacrer au yoga. La discipline ne la quitte plus. Elle développe en parallèle une passion pour l'entraînement en salle qui lui permet de se dépasser et de mieux performer dans ses activités qui demeurent nombreuses. La pratique du tissu aérien étant probablement la plus originale.
Incapable de rester sur place, elle partage sans retenue son énergie contagieuse via une approche structurée qui demeure toujours ludique.
Avec sa soif infinie de connaissances, elle veut vous aider à atteindre votre objectif, quel qu'il soit. Elle saura trouver les bons outils pour y parvenir.
Formations: B. Sc. Kinésiologie UQAM / Formation professorale de yoga 200h (certifiée Yoga alliance) / Rehab-U, niveau 1 et 2 / Formations Bia - Le plancher pelvien et l’entraînement avec charge - Réadaptation après césarienne / Stage Kinatex Rosemont - Intervention en périnatalité
RÉFÉRENCES
Effects of exercise on diastasis of the rectus abdominis muscle in the antenatal and postnatal periods: a systematic review / Benjamin, D.R. et al., 2014
The effect of post-natal exercises to strengthen the pelvic floor muscles / Mørkved, S. et al., 1996
Effect of postpartum pelvic floor muscle training in prevention and treatment of urinary incontinence: a one-year follow up / Mørkved, S. et al., 1996
Avant et après bébé: exercice et conseils / Éditions du CHU Sainte- Justine, 2011
75 exercices thérapeutique pour future maman: prévenir et soulager les douleurs et l'inconfort liés à la grossesse et la période postnatale / Les éditions de l’homme, 2015
Women's Health: Obstetrics and Pelvic Floor / Éditions McGraw Hill, 2012.
Le corps après l’accouchement / Publication Institut national de santé publique du Québec
Directive clinique conjointe de la SOGC et de la SCPE : L’exercice physique pendant la grossesse et le postpartum / Publication conjointe de la Société canadienne de physiologie de l’exercice et la Société des obstétriciens et gynécologues du Canada