Les bienfaits de l'entraînement en isométrie

PAR: VINCENT COUTURIER
ENTRAÎNEUR - THÉRAPEUTE DU SPORT


Qui n’a pas été confronté à la planche et la chaise à ses débuts en entraînement ? Ces deux exercices, dont l’efficacité est reconnue, font partie d’une famille dont le nom est moins connu: l’entraînement en isométrie. Cette méthode comporte plusieurs bienfaits et peut compléter efficacement un entraînement plus classique, en force ou puissance. Comment tirer le maximum d’une méthode où le mouvement est minimum ? C’est ce que nous allons esquisser dans cet article.

Définition

Avant de discuter des effets de cette méthode, commençons par la définir. Le terme «isométrique» vient du grec «iso» pour «égal» et «metron» pour «mesure». La combinaison désigne un élément dont les dimensions sont identiques. Dans le contexte de l’entraînement en isométrie, c’est la contraction musculaire qui sera qualifiée d’isométrique. Cela se traduit par unité musculo-tendineuse qui garde une longueur constante pendant l’effort.

Il ne faut pas confondre les exercices isométriques avec les exercices isotoniques. Nous utilisons fréquemment les exercices isotoniques sans nécessairement les nommer ainsi au quotidien. La charge peut être équivalente entre les deux méthodes, la position variera au fil du mouvement pour un exercice isotonique. Il n’y aura pas de mouvement dans la variation isométrique.



De façon générale, une contraction isométrique permet de générer une plus grande force qu’une contraction concentrique effectuée lors d’un exercice isotonique. Par exemple, nous sommes en mesure de maintenir, le coude plié, un haltère de 50 lb, mais nous ne sommes pas nécessairement tous capables de produire la force nécessaire pour effectuer une flexion avec le même poids pour ainsi amener la charge vers son épaule lors d’une flexion (curl). 

L’entraînement en isométrie consiste donc à exercer une force sans bouger, comme pour les exercices mentionnés en introduction, la planche et la chaise. Plutôt simple !

Malgré cette simplicité, il existe deux façons d’effectuer un travail isométrique. La première se nomme isométrie «soutenue» ( «holding isometric» ou «yielding isometric» en anglais ). Elle consiste à résister à une charge externe dans une position fixe pendant une période déterminée. La planche et la chaise font partie de cette catégorie. Nous maintenons une position et le poids corporel agit comme charge externe. Un autre exemple: tenir une flexion biceps (curl) à mi-chemin. La charge est alors l’haltère.

La deuxième technique se nomme isométrie «poussée» («overcoming » ou «pushing isometric» ). L’exercice est effectué en poussant ou en tirant un objet fixe. Habituellement, on vise un effort maximal ou presque maximal, et la position est maintenue pour moins de 5 secondes. Puisque l’objet ne peut se déplacer, la contraction se fait sans qu’il y ait mouvement au niveau des articulations. Un exemple de cette technique est un exercice d’extension de la jambe (leg extension) avec blocage de l’appui à un angle précis. Le tirage à mi-cuisse (mid-thigh pull), où la course de la barre olympique est limitée via des chaînes la rattachant au sol, est un autre exemple d’exercice en isométrie poussée.

BIENFAITS/PARTICULARITÉS

La définition de l’entraînement en isométrie en banque, voyons maintenant les bienfaits associés à son usage. Tout comme un exercice isotonique, les exercices isométriques provoquent des adaptations physiologiques importantes telles que l’hypertrophie musculaire et tendineuse ou encore des améliorations neuromusculaires.

Au niveau de l’hypertrophie musculaire (gain de masse musculaire), on peut envisager, au démarrage, une augmentation de l’épaisseur musculaire d'environ 0.86% par semaine selon certaines études. Certains paramètres peuvent influencer et optimiser les gains: l’intensité du travail, le niveau d’étirement du muscle, la durée de la contraction ainsi que le volume de travail effectué parmi d’autres. Ainsi travailler avec un muscle plus étiré, une intensité plus grande que 20% de notre maximum, une contraction plus longue ainsi qu’un volume d’entraînement plus élevé améliore l'hypertrophie obtenue via l’entraînement en isométrie.

Côté hypertrophie des tendons, les paramètres d’étirement et durée viendront impacter les résultats selon la même logique que l’hypertrophie musculaire. Pour l’intensité, comme les tendons nécessitent de grandes charges pour être stimulés, il  faudra travailler au-dessus de 70% de la charge maximale pour observer une adaptation significative. Les mêmes conditions permettent aussi d’augmenter la raideur du tendon en changeant à la fois ses qualités viscoélastiques et son épaisseur, une caractéristique désirable au niveau des performances sportives.

Lorsque l’on recherche un gain de force/puissance, les exercices isométriques de poussée seront privilégiés. Une intensité minimale d'environ 50% de notre charge maximale sera la cible. Au-delà (60%, 70% ou 80%), il n’y aura pas de différence significative en ce qui concerne le gain de force/puissance.

Une particularité importante du développement de la force avec l’entraînement isométrique est qu’il sera spécifique à l’angle articulaire utilisé. Par exemple, en reprenant l’exercice dans l’image ci-dessus (flexion bicep), le plus grand gain en force sera à l’angle utilisé (~90°). Le gain observé à d’autres angles, disons 45° ou 135°, sera plus faible que celui à 90°. 

En revanche, utiliser un angle articulaire qui permet à un muscle sous tension d'être plus étiré permet un plus grand transfert à d’autres angles. Pour bien comprendre ce concept, visualisons deux scénarii: un entraînement avec une flexion du biceps isométrique à 45° (scénario A) et le même exercice effectué à 135° (scénario B). En A, la plus grande augmentation de force aura lieu à 45°, et en B, à 135°, comme expliqué précédemment. Cependant, le gain en force observé à 45° dans le scénario B sera plus grand que le gain de force à 135° dans le scénario A. Il est donc préférable d’effectuer des exercices en isométrie avec un muscle sous tension plus étiré.


À gauche l’exercice fait et à droite le gain en force mesuré dans deux positions à échéance.


À gauche l’exercice fait et à droite le gain en force mesuré dans deux positions à échéance.


L’intention peut aussi impacter les résultats. En ayant une intention balistique (explosive) où nous poussons le plus rapidement possible dans l’objet qui est immobile, le taux de développement de force (TDF) est plus important. Si la force appliquée à l’objet est augmentée de façon graduelle et contrôlée, le résultat n’est pas aussi bon. Le TDF est important puisqu’il permet d’obtenir une meilleure accélération.

avantages

Au regard des bienfaits évoqués, on peut se demander pourquoi choisir l’isométrie si un exercice isotonique plus classique, dont les résultats escomptés sont similaires, est à portée de main. Les avantages suivants sont à souligner.

Premièrement, la spécificité de l’angle articulaire travaillé. Cela nous permet de travailler nos faiblesses! Par exemple, si un athlète démontre une difficulté dans le bas du squat (cuisse parallèle au sol), utiliser une pause dans cette position (la pause est une contraction isométrique) nous permet de renforcer les extenseurs du genou et de la hanche à cet angle particulier.

L’isométrie est aussi souvent utilisée pour gérer des blessures/pathologies, puisqu’elle permet d’augmenter la force dans les arcs articulaires douloureux, sans passer par eux. On peut ainsi éviter des inconforts. Elle est aussi utilisée dans des cas de tendinopathies, où nous cherchons une adaptation du tendon qui nécessite une plus grande charge/intensité pour s’adapter de façon positive (rappelons-nous qu’une contraction isométrique est plus forte qu’une contraction concentrique). Les contractions isométriques tendent aussi à causer moins de fatigue, ce qui peut être utile pour moduler la charge de travail dans certains contextes exigeants.

Finalement, la simplicité d’utilisation est un véritable atout. Dans la majorité des cas, les exercices isométriques nécessitent peu de matériel et une mise en place assez rapide, que l’isométrie soit obtenue via un effort soutenu ou poussé. Côté soutenu, une position de squat sur une jambe, de chaise ou maintenir figé une traction au menton sont autant d’exemples où la simplicité est au rendez-vous. Pour l’isométrie poussée, ajuster la hauteur des bras de sécurité sur une cage à squat pour effectuer en appui avec une barre olympique un squat, un soulevé de terre, un développé-épaules ou même un développé-couché n’a rien de sorcier.

À RETENIR

Nous avons tous croisé l’entraînement isométrique à un moment. Complémentaire, mais également efficace, malgré le fait que le mouvement ne soit pas présent, il permet de travailler hypertrophie, force et puissance. L’isométrie mérite ainsi sa place dans tout bon programme d’entraînement. N’hésitez pas à venir vers nous pour en apprendre davantage, car cet entraînement va bien au-delà de la planche et de la chaise!


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QUELQUES MOTS SUR VINCENT

Avec un bagage important comme skieur, une ceinture noire en Kung Fu, une passion pour l'haltérophilie et la dynamophilie, il n'y a pas que le parcours sportif de Vincent qui témoigne d'une solide curiosité. En plus de ses études en thérapie sportive à Concordia, il est ingénieur en aéronautique.

Ce parcours peu commun lui confère une capacité d'analyse et une ténacité communicative qu'il utilise à bon escient en entraînement personnel et dans les cours.

Calme et muni d'une écoute sans faille, il sait consolider l'engagement chez les membres qu'il a la chance d'épauler.

Formations: B. Sc. Thérapie du sport /  Certified strength and conditioning specialist (CSCS/NSCA)


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